 |
Territoires
... à observer, découvrir, inventer, protéger
La notion
de territoire a pris une importance croissante en géographie
et notamment en géographie humaine et politique (...).
Dans le dictionnaire de géographie de Pierre George et
Fernand Verger le territoire est défini comme un espace
géographique qualifié par une appartenance juridique
(on parle ainsi de « territoire national ») ; ou
par une spécificité naturelle ou culturelle : territoire
montagneux, territoire linguistique. (...) Quelle que soit sa
nature, un territoire implique l'existence de frontières
ou de limites. Ces deux derniers termes sont utilisés
en fonction du type de territoire dont ils forment le périmètre.
Un territoire politique, ou une subdivision administrative, est
délimité par une frontière ; un territoire
naturel est circonscrit par une limite, terme moins juridique.
(Wikipédia)
Dans le cadre
de ce projet, j'ai mené une résidence à
l'école Riblette autour de mon travail sur le territoire
et ses représentations. En mutation constante, le territoire
planétaire est profondément marqué parfois
même défiguré ou dévasté -
par les activités humaines. Indéfiniment remodelé
dans sa forme, et requalifié dans sa fonction, il offre
à nos regards une suite infinie de changements, parfois
microscopiques parfois brutaux, que nous ne savons pas toujours
percevoir ni interpréter. La richesses visuelle offerte
par notre environnement quotidien est émoussée
par le train des habitudes, chargé d'idées reçues
et de stéréotypes. Les mêmes trajets sont
pourtant chaque fois éclairé d'un ciel nouveau
et grouillant du mouvement d'une vie débordante. En ville
l'humain semble occuper le terrain sans contestation, mais à
la campagne, la présence du végétal et de
l'animal s'impose à nos regards souvent perplexes et parfois
craintifs. Le regroupement des hommes dans les villes contribue
à changer nos perceptions du monde et le regard que nous
portons sur lui. Accoutumés aux images en mouvement dont
l'omniprésence kaléidoscopique hante tous nos instants,
le rythme immuable de la nature nous devient insupportable, voire
même inquiétant et d'une exaspérante lenteur.
Les images elles-mêmes ne sont plus pensées pour
s'inscrire dans le temps et accompagner nos réflexions
sur le monde mais pour percuter notre champ visuel l'espace d'un
instant, avant d'être chassées par les suivantes...
Tant d'images veulent s'offrir à nos regards que ceux-ci
s'affolent parfois comme les boussoles qui perdent leur nord,
impuissants à tout embrasser ils s'épuisent dans
un mouvement compulsif. La photographie, quand elle n'est pas
dédaignée pour son immobilité, s'invente
de nouveaux modes d'être pour ne pas disparaître.
Elle s'immisce dans nos téléphones, nos agendas,
s'échange en temps "réel", se jette et
s'oublie tout aussi vite. Avec les enfants de l'école
élémentaire Riblette, c'est le regard que nous
avons d'abord interrogé. Habituellement, je vois d'abord
ce qu'on veut me montrer, ou ce que je veux regarder, à
travers le filtre de ma culture, de mes connaissances et de mes
préjugés. Je m'inscris d'une manière qui
me semble spontanée dans une certaine vision du monde
ancestralement héritée de mes parents, mais plus
récemment grandement formatée par les médias
et l'imagerie publicitaire. Nombre des repères et symboles
sur lesquels s'appuient les enfants d'aujourd'hui sont issus
de la télévision, du cinéma ou des jeux
vidéos.
Cet atelier visait à leur faire poser un autre regard
sur leur environnement, proche pour ceux qui ont travaillé
sur le quartier, plus lointain pour ceux qui ont découvert
un petit coin de Bretagne ou la classe qui s'est demandé
ce que c'est qu'être européen aujourd'hui - comme
Montesquieu se demandait comment on pouvait être persan
à son époque. Qu'est-ce qui fait que l'autre nous
est ou pas étranger ? Une frontière ? Une langue
? Un mode de vie ? Comment peut-on mieux s'approprier le territoire
de l'Europe et comprendre ce qui fait que nous sommes tous européens
? Après un travail de recherche, les enfants se sont inventés
une autre vie dans laquelle ils ont bien sûr projeté
une part de la leur... Dans la vie comme en photographie, (presque)
tout est une question de point de vue et d'ouverture !
Marie-Hélène
Le Ny |
 |